Le 30/01/2021, une centaine de personnes en situation de séjour irrégulier sont entrées dans l’église du Béguinage. L’action n’était pas une action par et pour les personnes “sans logement”, mais une action politique. Il s’agissait de travailleurs sans papiers qui travaillaient ici depuis de nombreuses années, généralement dans des situations de grave exploitation. Covid avait sérieusement détérioré leurs conditions de vie.
La déclaration gouvernementale indiquait qu’une campagne de régularisation ne serait pas discutée pendant cette période gouvernementale, ce qui n’était plus acceptable pour les travailleurs sans-papiers. Il était tout simplement impossible qu’ils soient considérés comme des êtres inexistants, comme des “personnes de l’ombre” pendant quatre ans de plus, tout en étant “utiles” en tant que main-d’œuvre très bon marché/exploitée”.
Reconnaissant leur cri de dignité, nous avons toléré l’occupation. Nous ne pouvions pas l’accepter, car avec la covid, même les services religieux avec plus de 15 personnes étaient impossibles. Nous avons indiqué que – à notre avis – ils n’obtiendraient certainement pas tout ce qu’ils voulaient obtenir. Mais nous avons pensé qu’ils pourraient avoir le mérite de remettre à l’ordre du jour politique la situation inhumaine dans laquelle ils vivent.
Après les négociations des 20 et 21 juillet (auxquelles nous avons été autorisés à participer), nous pensions que tout un groupe de gens serait reconnu. Aujourd’hui, nous nous sentons très déçus quand nous voyons le nombre de réponses négatives, même pour des personnes dont nous pensions qu’elles avaient d’excellents dossiers, des dossiers qui – après les discussions avec les autorités – se termineraient certainement par une réponse positive.
La lutte pour une politique d’asile et de régularisation plus humaine se poursuit. Nous voulons continuer à la soutenir partout où nous le pouvons, en aidant à trouver les moyens les plus appropriés.
La plupart des militants qui ont participé à l’occupation sont entre-temps rentrés chez eux. Cela signifie également le retour à des situations d’exploitation humiliantes, car il faut survivre.
Il restait donc une vingtaine de personnes dans l’église qui, entre-temps, étaient devenues des sans-abri, et ce dans une situation d’accueil non humaine (1 toilette, pas de chauffage, pas de sanitaires, encore moins de douches). Ce n’est absolument pas le but de l’église et, comme vous pouvez le lire, elle n’y est encore moins adaptée ! De plus, nous savons – par expérience – que de telles situations peuvent également devenir dangereuses et donc très contre-productives.
Pour toutes ces raisons, il a été demandé aux militants de vider l’église, sachant que plusieurs personnes cherchent une solution pour les “20” restants. Après une rénovation complète, l’église sera rouverte pour les fonctions de House of Compassion, un lieu de lutte pour la justice et la compassion pour les personnes en situation de séjour irrégulier, mais aussi pour d’autres groupes.
Que ce soit bien clair : ce n’est en aucun cas un signe que nous voulons nous désolidariser de la lutte des personnes sans résidence légale pour une politique d’asile et de régularisation plus humaine ! Par le passé, nous leur avons déjà demandé à deux reprises de quitter l’église parce qu’elle n’était plus sûre ou appropriée pour une action politique. Nous n’avons pas été moins solidaires avec eux après cela. Aujourd’hui ce ne sera pas le cas non plus.
Nous voyons, par exemple, l’Allemagne, où le nouveau gouvernement a clairement pris un virage. Elle déclare honnêtement : “Admettons que nous sommes un pays d’immigration de fait et que nous avons besoin les uns des autres ! Soyons donc ouverts et corrects.” Par exemple, tous ceux qui vivent en Allemagne depuis 5 ans (sans véritable casier judiciaire) auront un an pour obtenir un contrat de travail ou commencer une formation dans un métier en pénurie. Ils peuvent ainsi obtenir un permis de séjour qui leur permet de ne plus survivre dans une exploitation dégradante, mais d’apporter une contribution normale à la société, avec des droits et des obligations comme tout le monde.
Pourquoi cela ne serait-il pas possible dans notre Belgique, qui est aussi devenue un pays d’immigration ? Nous voulons travailler là-dessus aussi fort que possible : De la dignité pour eux et une politique digne pour nous.
House of Compassion, Bruxelles, 4 janvier 2022
Author: Daniel Alliët