Après la veillée du samedi 3/11 où se sont exprimées des personnes confrontées aux conséquences de la numérisation croissante de notre société, le thème du samedi 3/12 était : fracture numérique … quelles solutions ?
Nos intervenants ont mis en lumière le thème à partir des différents niveaux de décision politique (municipal, régional et fédéral), complétés par les initiatives de Welzijnszorg, qui mène cette année une campagne spécifique sur ce thème ‘Allemaal digitaal?!’
Welzijnszorg Allemaal digitaal?! (Hilde Geurts)
« Non, il n’y a pas que les personnes âgées qui rencontrent des barrières numériques ! »
Les barrières sont à la fois :
- physiques : pas (ou pas assez) d’ordinateur, internet : 1 famille avec plusieurs enfants, nécessaire pour l’école et parfois le travail des parents ; l’abonnement internet n’est pas abordable pour tout le monde
- que cognitives : consulter TikTok, Facebook, Instagram, oui mais éditer un fichier excel, créer un compte ou remplir un formulaire complexe n’est pas évident pour tout le monde
‘Welzijnszorg’ attire l’attention sur les solutions, notamment :
- le droit à ne pas être connecté
- les services doivent également être accessibles par des canaux non-numériques
- les services doivent être inclusifs (c’est-à-dire utilisables par tous).
Points forts de la campagne :
- le 15/12/2022, 16:00 (Carrefour de l’Europe) moment d’action, en collaboration avec le secteur social : « nous ne pouvons plus faire de travail social parce que nous sommes trop mis en cause pour les problèmes d’administration numérique ».
- jusqu’au 15/1/2023 : tout le monde peut signaler les problèmes liés aux barrières numériques par le biais de cartes postales gratuites, Welzijsnzorg s’adressera aux organisations où se produisent la plupart des problèmes
BXL: CABAN (Lauriane Paulhiac)
Grâce à un reportage vidéo, nous avons pu nous faire une idée précise de la situation des EPN (Espaces Publics Numériques), un instrument dont on a fortement besoin mais qui est confronté à de nombreux problèmes, notamment :
- pas de budget durable pour les animateurs : les personnes vers qui se tourner (bénévoles, contrats précaires à mi-temps, souvent tirés d’autres sources)
pas de lieux neutres (par exemple le CPAS, tout le monde ne veut pas s’identifier au CPAS, ou les centres de formation, certains ont déjà des expériences négatives avec la formation, …)
Il semble que les décideurs politiques partent du principe que si la population est équipée d’ordinateurs et de l’internet, elle acquerra les compétences nécessaires pour y faire face. Il n’existe pas non plus de formation générale de la population (par exemple, pour se défendre contre les mécanismes de marché sous-jacents (cookies, protection de la vie privée, etc.) ou pire : les escroqueries.
Les EPN constituent une solution indispensable mais ne disposent pas de ressources suffisantes pour atteindre la grande partie de la population bruxelloise qui en a besoin.
Federal: UCLouvain (Périne Brotcorne)
A travers une vidéo ‘La numérisation des services publics, l’envers du décor’, nous avons eu une explication très claire et forte sur enjeux et des mécanismes sous-jacents ; quelques constats :
- le moteur est économique (plus de services et de meilleurs services à un coût inférieur) – cependant, les services se sont dégradés pour une partie de la population.
- ‘la technologie conduit la société au progrès social » et qu’en est-il de la neutralité de la technologie ? tout au long du processus de développement, des décisions (politiques) sont prises.
- qui est au volant ? Les services informatiques et de marketing ont beaucoup de mal à se mettre à la place des personnes qui ne sont pas (totalement) « embarquées » dans les évolutions technologiques ; par conséquent, la numérisation crée de facto de plus grandes inégalités.
- comment impliquer tous les utilisateurs dans le développement de ces services numériques ? le suivi en ligne (traçage) de ceux qui sont déjà sur l’internet ne donne pas une bonne idée de ceux qui ne sont pas « embarqués ».
Commune de Schaarbeek (Heleen Huysentruyt)
De Schakel est une association où les démunis prennent la parole. Sur la base de signaux concrets provenant de la base, une offre est élaborée, par ex.
- cours sur l’utilisation des tablettes, petites réparations d’ordinateurs, création d’un réseau (de support) de substitution,…
- une carte où trouver des services inclusifs
mais l’on s’applique également à informer les politiques par :
- l’implication de citoyens vulnérables dans l’élaboration de la société numérique (par exemple, test du nouveau site web du CPAS par le groupe cible).
- Le groupe de travail sur l’exclusion numérique (CASS) produit un rapport et un événement pour sensibiliser les services municipaux.
- l’interpellation du conseil municipal et élaboration d’une feuille de route pour la numérisation.
Malheureusement, nous constatons qu’il y a trop peu d’écoute au niveau régional (CIBG) et que les promesses de fonds structurels restent lettre morte. La manière dont la numérisation est réalisée (notamment l’effet d’exclusion sociale) n’est pas remise en question.
Par conséquent, des organisations à mission sociale comme De Schakel doivent assumer ces tâches administratives au détriment de leurs tâches premières et de leurs budgets globaux.
Conclusion :
Périne Brotcorne plaide pour la liberté de choix (numérique ou non), Lauriane Paulhiac rappelle que tout citoyen a le droit de s’exprimer de manière autonome et Heleen Huyzentruyt vit au quotidien l’effet d’exclusion de la numérisation.
Des solutions telles que
- les EPNs,
- des services supplémentaires pour soutenir les personnes exclues par le numérique et
- une approche judicieuse au développement de services inclusifs ne reçoivent pas suffisamment de ressources.
Autant de raisons pour soutenir la campagne « Allemaal Digitaal?! » de Welzijnszorg et de demander à la politique d’apporter des solutions structurelles, notamment une approche réfléchie de la numérisation avec des mesures concrètes pour supprimer les obstacles numériques, en particulier pour les citoyens vulnérables.